25 mai 2022

Noé Rimbourg intervient dans le cadre de sa recherche doctorale « la Vierge Noire »

Noémie Rimbourg, doctorante intégrée au projet interdisciplinaire ARC — AutonomiCap : « L’autonomie à l’épreuve du handicap, le handicap à l’épreuve de l’autonomie » (USL-B), a réalisé deux communications en lien avec sa recherche doctorale :

ABSTRACT :

Intégrée au projet interdisciplinaire ARC AutonomiCap, « L’autonomie à l’épreuve du handicap, le handicap à l’épreuve de l’autonomie », ma recherche s’intéresse aux pratiques d’évaluation qui conduisent à reconnaitre des personnes comme « handicapées » sur la base de leur capacité de travail et de leur autonomie en Belgique. À la croisée d’une sociologie de l’action publique analysant les pratiques professionnelles et les instruments, et d’une sociologie du handicap, cette recherche met à jour les dilemmes éthiques et pratiques de l'action dans un contexte marqué par des chevauchements institutionnels, une recrudescence et une évolution des demandes de reconnaissance, ainsi qu’une transformation des pratiques d’évaluation.

À partir d’une situation concrète observée dans le cadre d’une enquête ethnographique, cette communication propose de présenter les conditions de la production administrative du handicap et ses usages détournés, en évoquant plus particulièrement la problématique des frontières entre handicap, maladie et pauvreté. Il s’agit de montrer pourquoi et comment cette problématique agit sur les pratiques d’évaluation, génère des tensions, et contribue à diffuser un climat de soupçon généralisé vis-à-vis vis du bien-fondé des demandes. Une attention sera portée sur la manière dont les évaluateur.ices font face à ces tensions pour prendre finalement une décision, en conditionnant parfois l’octroi du statut de « personne handicapée » à une durée limitée. Cette intervention sera l’occasion de proposer une réflexion sur les nouvelles manières de reconnaitre, produire et concevoir le handicap, sur leurs enjeux et les risques qu’elles recouvrent, au regard de l’impératif d’inclusion mais aussi de protection des populations vulnérables.

 

  • « La production administrative du handicap et ses effets : le cas des jeunes confrontés à un trouble mental-psychique en Belgique », une intervention qui s’est déroulée le 20 mai 2022, dans le cadre de l’Atelier de recherche IRIS (Unité mixte de recherche associant l’EHESS, le CNRS, l’Inserm et l’Université Sorbonne Paris Nord, l’Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux) - La dimension sociale et culturelle des troubles psychiques : âge et santé mentale.

ABSTRACT :

Intégrée au projet interdisciplinaire ARC AutonomiCap, « L’autonomie à l’épreuve du handicap, le handicap à l’épreuve de l’autonomie », cette recherche s’intéresse aux pratiques d’évaluation qui conduisent à reconnaitre des personnes comme « handicapées » sur la base de leur capacité de travail et de leur degré d’autonomie en Belgique. À la croisée d’une sociologie de l’action publique et des professions (Champy F., 2012 ; C., Genard, J-L., 2015 ; Lascoumes, P., Le galès, P., 2005 ; Weller, J-M., 2018), et d’une sociologie du handicap (Bodin, R., 2019 ; Ville, I., Fillion, E., Ravaud., J-F, 2020 ; Winance, M., 2004), cette recherche met à jour les dilemmes éthiques et pratiques de l'action dans un contexte qui se caractérise par l’évolution des profils de demandeur.ses (de plus en plus de demandes qui se rapportent à un trouble psychique), et l’ancienneté et le flou de la législation qui encadre la procédure (loi du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées).

 En effet, en ce qui concerne l’évaluation de la capacité de travail, celle-ci n’est pas clairement définie par la loi. En ce qui concerne l’évaluation de l’autonomie, il s’agit d’attribuer des points en fonction du niveau de difficulté estimé dans différentes fonctions et/ou activités de la vie quotidienne (se déplacer, assurer son hygiène personnelle et son alimentation, assurer sa sécurité, avoir des contacts sociaux…), en sachant que  le nombre de points accordé définit le montant des allocations octroyées. Au regard de cette grille, l’autonomie se rapporte à une conception fonctionnelle qui se montre peu adaptée aux problématiques psychiques. Si l’évolution des types de demandes a conduit les évalateur.ices à modifier et à adapter leurs manières d’évaluer, les personnes confrontées à des problématiques psychiques restent globalement cantonnées à des faibles forfaits de points et donc d’allocations.

Cette communication propose de revenir sur les conditions de la production administrative du handicap lorsqu’il s’agit de jeunes adultes confrontés à des troubles psychiques, en croisant différents matériaux : des observations réalisées dans le cadre d’une enquête ethnographique, des éléments récoltés dans le dossier de demande, des données codées dans le logiciel de traitement et de justification de la décision finalement prise. Ainsi, en tenant compte des instruments et de la matérialité du dossier, il s’agira de montrer comment s’opère le travail d’interprétation et de traduction d’un trouble exprimé par la personne et/ou par son entourage, en point d’autonomie et en incapacité de travail, tout en tentant de déceler les normes auxquelles les evaluateur.ices se rapportent. Il s’agira aussi d’évoquer les dilemmes et les tensions rencontrés par les acteur.ices dans ce type de situation : risque d’enfermement dans un dispositif d’aide sociale considéré comme peu enviable, risque de maintenir une relation de dépendance entre le.la jeune et sa famille, mais aussi intérêt de protéger et de valoriser les efforts consentis par le.la jeune.  Enfin, dans une perspective pragmatique, et en s’appuyant sur la notion d’autonomie relationnelle telle que proposée par les théoricien.nes du care (Feder Kittay, E., 2001), cette intervention sera l’occasion de proposer une réflexion sur les enjeux et les limites de la reconnaissance administrative du handicap dans ce type de situation : précarité, étiquetage, transfert des prérogatives et des compétences de l’état aux familles etc…